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Le café Philo de Nouméa
7 juillet 2010

session du mardi 6 juillet : L'hypnose : un travail sur la conscience? avec Marianne Devaux

L'introduction à la session

La philosophie est une quête de sagesse et de lumière pour percevoir la réalité justement et se conduire justement. Comme le dit Socrate par les mots de Platon, "il ne s'agit pas seulement de vivre mais de bien vivre". Or nous percevons le monde dans notre conscience et celle-ci est encombrée d'aprioris, de jugements, de croyances, de peurs qui nous polluent.
Le travail philosophique est donc un œuvre de purification et d'affinement des concepts et des idées afin de pouvoir penser clairement. Le filtre de notre mental et de nos émotions déterminant notre perception de la réalité et donc notre conscience du monde. On comprend donc l'exigence philosophique menée par celui qui veut saisir le monde comme il se donne et non comme il lui est donné par sa conscience imparfaite.

Pour la philosophie, tout est conscience et l'inconscient n'est qu'une partie de la conscience qui est en dessous du seuil de la vigilance, de l'attention ou de la conscience (de veille). A l'instar de la partie immergée de l'iceberg qui fait néanmoins partie de l'iceberg en tant que tout. En travaillant parfois sur les mythes et les archétypes qu'ils contiennent, la philosophie rejoint cependant aussi cette façon de plonger dans la partie cachée de la conscience pour l'amener à la surface.
Si le soucis philosophique est donc plus de sagesse et de lumière pour bien vivre, afin de distinguer autre chose que des ombres projetées sur l'écran de la conscience, que peut nous apporter l'outil de l'hypnose?

Cette question intéressée est à mettre en perspective avec le processus spirituel chez l'homme qui correspond à une augmentation de conscience. On sait que le processus des initiations est à chaque fois l'actualisation d'une augmentation de la conscience de l'initié qui peut désormais alors avoir une vue plus vaste, plus profonde, plus intelligente de la réalité. On rappelle toujours à cet égard que ce n'est pas le monde qui change mais la façon de regarder le monde. Avec les lunettes d'une conscience aux filtres purifiés?
Cela signifie donc faire reculer progressivement la part de la réalité qui n'est pas conscientisée par l'individu, qui est inconsciente... ou que la lumière de la conscience n'éclaire pas et laisse encore dans l'ombre.
Le but de l'homme sage étant d'élever sa conscience individuelle à une conscience universelle, voir divine et donc d'avoir une pleine conscience, sans limitation, donc sans inconscient...

Mais cette perspective classique n'est pas forcément celle des théories modernes sur l'inconscient, considéré plutôt comme un réservoir de force à disposition de chacun. Notamment dans le cas de l'hypnose thérapeutique Eriksonienne.


hypnose04


Présentation de Marianne Devaux

« L’hypnose un travail sur la conscience »
Le titre est un peu provocateur, car lorsqu’on parle d’hypnose, on pense normalement plus à l’inconscient. En fait le conscient et l’inconscient sont intimement liés, c’est juste différentes parties de la même personne, qui déterminent ses pensées, ses actes, ses ressentis, sa vision du monde, ses croyances, son état de santé….bref son identité et ses rapports aux autres.

C’est un va et vient entre conscience et inconscience qui permet aux choses nouvelles de s’intégrer en nous, qui permet le changement. Changer c’est le but de la psychothérapie, on dit d’ailleurs que l’hypnothérapie c’est l’art du changement.

L’hypnose permet donc de faciliter le changement, mais la première démarche est de savoir quoi changer. C’est une réponse très personnelle qui dépend de l’idée que l’on se fait de son bonheur, de sa liberté. Nous connaissons tous des personnes qui ont des difficultés, sans forcement avoir vraiment envie de les régler. Elles pensent peut-être que la vie est ainsi, qu’il faut souffrir, qu’avec l’éducation qu’elles ont eue, c’est normal qu’elles aient tel problème… Je suis comme ça, c’est ma nature, la vie est ainsi… Peut-être aussi que leurs difficultés ont quelques avantages intéressants, comme un enfant qui est malade et qui profite des petits soins attentionnés de sa mère en loupant l’école. Une des questions les plus intéressantes, c’est pourquoi, alors qu’on a vécu pendant des années, voire des décennies avec un problème, tout d’un coup, on décide que cela suffit. Cela peut être une douleur, une émotion, un manque de confiance en soi, une relation, un comportement. « Aussi audacieux soit-il d’explorer l’inconnu, il l’est plus encore de remettre en question le connu ». Qu’est ce qui provoque ce déclic ? Cette volonté de changer ? « Du bon usage des crises » écrivait Christiane Singer. Je ne sais pas d’où cela vient et comment cela vient, mais je sais que c’est le point de départ.

Une fois que l’on sait ce que l’on veut changer, il faut trouver les moyens d’y parvenir. La réponse la plus commune est celle de la volonté, arrêter de faire ceci, se mettre à faire cela, ne plus se laisser impressionner, dire ce que l’on pense, prendre du temps pour soi… vous savez toutes ces belles résolutions qu’on ne tient jamais. Pourquoi, parce que si ce n’est pas déjà fait depuis longtemps, c’est qu’une partie de vous n’est pas d’accord, et cette partie elle est très souvent inconsciente, et l’inconscient est tout simplement plus fort que le conscient, c’est donc lui qui gagne.

D’où l’intérêt d’aller discuter avec votre inconscient pour lui expliquer ce que vous voulez, et qu’il soit votre allié, qu’il mette tous ses moyens qui sont immenses au service de votre objectif. L’intérêt de l’hypnose thérapeutique c’est donc de solliciter l’inconscient pour faire ce que le conscient veut.

Les méthodes employées découlent de l’observation du travail de Milton Erickson, d’où leur nom d’hypnose éricksonienne. Milton Erickson a vécu de 1901 à 1980 aux Etats-Unis. Médecin, psychiatre, redécouvreur de l’hypnose thérapeutique, chercheur passionné, formateur inlassable, c’est surtout un homme d’une grande humanité qui a aidé plus de 30.000 personnes à aller mieux.

L’hypnose est un phénomène naturel, elle existe donc depuis toujours. L’hypnose thérapeutique existe depuis fort longtemps, à Athènes 5 siècles avant Jésus-Christ, Antiphon inventait l’art de l’apaisement par la parole, on dit qu’il soignait avec des mots. J’ai choisi cet exemple car nous sommes dans un café philo, mais il y en a des milliers d’autres. C’est l’occasion de vous rappeler qu’on hypnotise plus facilement avec des mots qu’avec le regard. Revoyez la séquence du serpent dans le livre de la jungle sans le son, elle ne fait pas du tout le même effet, puis écoutez la sans la regarder, et comparez les deux expériences.

Le génie d’Erickson a été d’utiliser tout ce qu’il avait pour en faire quelque chose d’utile. L’exemple le plus raconté c’est celui de sa polio qui à 17 ans le laissa immobile pendant de longs mois, il développa à cette occasion une capacité d’observation qui fit sa force. Il lisait dans les gens à livre ouvert juste en les observant.

Autre exemple rigolo, enfant il apprit par l’expérience que tirer sur la queue d’un âne rétif est beaucoup plus efficace pour le faire avancer que de le pousser. Il en déduisit qu’en psychologie humaine aussi, il vaut mieux utiliser la résistance, se servir de tout ce que le patient apporte, ne jamais lutter contre, c’est ce qu’il appelait sa technique d’utilisation. D’où sa grande capacité d’adaptation, la création d’une approche naturelle et non autoritaire de l’hypnose. Avec Erickson, on est très loin du « DORMEZ, JE LE VEUX »   C’est ce qui fait que chaque séance est unique et que le thérapeute ne peut que s’adapter, avec créativité et humour.

Selon Erickson, la transe hypnotique est l’état dans lequel l’apprentissage et l’ouverture au changement peuvent se produire plus aisément. La transe ressemble à un état de rêverie, ou de méditation ou de prière, un moment où l’on décroche de l’environnement concret immédiat, pour être ailleurs. Pour moi, c’est de l’hyper concentration. Seul compte ce qui est en train de se passer. La personne en transe n’est pas sous influence, n’est pas dépossédée de sa volonté, bien au contraire est découvre en elle des capacités et des espaces de liberté qu’elle ne soupçonnait pas. Le conscient n’est pas endormi, c’est comme s’il devenait spectateur, ses moyens habituels d’expression sont court-circuités. Le seul intérêt c’est que le conscient ne bloque pas la communication vers l’inconscient. Que l’analyse ne vienne pas empêcher l’apprentissage. C’est comme lorsqu’on fait quelque chose sans y penser, on sait le faire, et si on se demande comment on fait, on ne sait plus le faire., même un geste aussi simple que tendre la main à quelqu’un.

L’intensité de la transe n’a aucun impact sur la qualité du travail avec l’inconscient, c’est la raison pour laquelle on peut très bien faire de l’hypnose conversationnelle, et parler à l’inconscient sans que le conscient ne sans rende compte. L’avantage avec l’inconscient c’est qu’il est toujours là, qu’il entend tout, stocke tout, emmagasine tout…

Lorsque l’on est confronté à un problème, ce qui nous gène, et que l’on veut changer, résulte d’un apprentissage que l’inconscient a fait à un moment donné, d’une expérience dont il a tiré des conséquences, des croyances. Il a appris à associer telle situation avec telle émotion, par exemple l’avion avec la peur panique, ou tel aliment avec telle réaction cutanée, ou telle personne avec tel sentiment d’énervement, tel stress avec tel comportement … Le plus simple pour rompre cette association automatique et donc se défaire du problème est d’apprendre à l’inconscient une autre association, un autre automatisme. Ainsi ce qui faisait peur peut faire rire. Le circuit le plus court est celui de l’ancrage kinesthésique, c’est le langage du corps et c’est le mode d’expression favori de l’inconscient.

La seule vérité qui soit c’est celle que l’on vit à l’intérieur, Ce qui compte c’est la façon dont on réagit aux situations extérieures. L’image du monde n’est pas le monde, la carte n’est pas le territoire. L’image du monde est une interprétation, elle peut donc être changée. La réalité est celle que nous créons. La pensée crée la réalité. D’ailleurs faire quelque chose ou imaginer faire cette même chose, active les mêmes zones du cerveau. L’inconscient ne fait pas la différence entre vivre réellement et imaginer, combien d’entre vous savent qu’ils rêvent pendant qu’ils rêvent ?

Il n’est pas très utile de savoir pourquoi nous avons à un moment donné créé une réalité qui nous pose problème aujourd’hui. Il est plus pertinent de savoir quelle réalité nous voulons vivre désormais. Il est plus efficace de comprendre comment créer cette nouvelle réalité.

Ainsi, on ne peut pas changer le passé mais on peut changer les répercussions que ce passé a aujourd’hui, les émotions qu’il suscite encore même s’il est vieux de plusieurs décennies, ou juste d’il y a cinq minutes.

Ainsi l’hypnose, où l’habitude de discuter avec son inconscient, ne sert pas simplement à régler des problèmes, cela sert à organiser sa vision du monde comme on veut qu’elle soit. C’est une ressource inépuisable, c’est un champ d’expériences infini. L’objectif est de ne plus subir ce que l’on croyait immuable, ses émotions par exemple, mais de prendre la main, de décider de ce que l’on veut vivre et de le faire.

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