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Le café Philo de Nouméa
1 mai 2009

Résumé de la session du mardi 21.04.2009 sur le thème du Toucher et Communication, invitée Bénédicte Jarlot

fichier à télécharger :  resume_Toucher_et_Communication

Toucher et Communication

Avant de parler du rapport entre les deux termes, il semble important de s'interroger sur le toucher lui-même et de lui faire subir une petite enquête (quasi) phénoménologique...

Le sens du toucher est de prime abord en rapport avec le plan physique dense. Avec le goût, qui a besoin du toucher pour se révéler, ils sont les deux seul sens qui sont liés directement au plan matériel.  La vue, l'ouïe et l'odorat, prennent leurs informations de supports matériels comme un tableau, une musique produite par un piano ou l'odeur d'une fleur, mais ils n'ont pas besoin d'un rapport direct (physique) avec la chose pour exister et révéler l'information. La communication de l'information sensuelle se fait par le biais de l'air, de l'espace qui sont les vecteurs de transmission entre la chose et notre organe de sens : l'oeil, l'oreille, le nez.

Pour le toucher en revanche, il faut qu'il y ait un contact. D'un point de vue objectif donc, le toucher pour se révéler, oblige deux choses à se rencontrer au point de se toucher. Mais qu'est ce que le contact? Penser le contact n'est finalement pas si évident! On peut dire que c'est lorsqu'il y a une mise en rapport entre deux éléments au point où l'espace qui les sépare se réduit à rien et que ceux-ci sont l'un sur l'autre ou l'un avec l'autre...si proches qu'ils se touchent. Tout en restant distincts, ils se trouvent réunis dans un espace si intime qu'ils sont alors dans un type de relation spécifique : celle du contact. Et la relation qui se noue lorsque ce mode est réalisé diffère de quand ils sont éloignés. Il y a alors une proximité si complète qu'un échange est possible. L'idée de contact, du toucher, est connexe de l'idée de rapprochement au point où l'on ne peut pas s'éviter. Où l'on se rencontre.

Intellectuellement, on ne peut pas aller beaucoup plus loin et cela nous renseigne en retour sur le mystère des sens qui se donnent naturellement à nous, dans notre corps, notre être et notre conscience... Les sens interpellent l'intellect puisqu'il traite les informations qu'ils envoient mais il semble qu'il ne peut analyser plus avant. Cette finitude intellectuelle nous invite vers le ressenti.

main_lumi_re_bleue


Le ressenti est cet autre mode de traitement qui est peut-être plus adéquate que le mental pour vivre l'information sensuelle... Une histoire de cerveau gauche et de cerveau droit pourrait-on dire aujourd'hui. La science nous apprend que ce sont les capteurs -au bout de nos doigts par exemple- qui transmettent l’information au cerveau lorsqu’il y a contact. Alors, on sait que l'on est en contact avec quelque chose. On devrait dire aussi que l'on sent ce contact... Et cette évidence directe ne supporte pas le doute. On conçoit alors que c’est la conscience qui enregistre ce fait mais la perception ne rime pas forcément avec mentalisation ni intellect. On sait, c’est tout !

Tout notre corps peut être touché et la peau est cette immense enveloppe sensuelle qui nous avertis en cas de contact. Soit nous sommes passifs, touchés par quelque chose qui vient à nous, soit nous touchons et sommes alors actifs, allant vers la chose (ou l'être) pour la rencontrer par le biais de ce contact physique.

Pour en finir avec le coté objectif,  il faudrait ajouter que  le contact ne semble être pertinent et total que lorsque les deux choses sont de la même densité de matière. Quand le physique touche le physique, il y a bien sensation perçue et transmission pleine de l'information. Mais si vous touchez un gaz par exemple, vous risquez de ne pas avoir une expérience très riche... puisqu'il est impalpable, que vous passez à travers. Vous n'êtes pas arrêté par lui et votre matière physique ne le rencontre pas sur ce plan.

Ajoutons cependant que l'on peut dire aussi que le gaz vous touche et qu'il va se passer quelque chose dans votre organisme, en réaction à sa rencontre. Il y aurait là un autre sens  à explorer, à considérer...

D'un point de vue subjectif, il est entendu que le touché peut-être de l'ordre du subtil.
A coté du plan physique, on exprime communément que l'on est touché émotionnellement, mentalement voir spirituellement par quelque chose. Il faut alors s'interroger pour savoir ce qui est touché en nous au point de reprendre une expression si généralement attribuée à la dimension matérielle? Si le toucher se résume au contact, à la mise en relation entre deux choses au point que le rapprochement si intime fait qu'il n'y a plus d'espace entre les deux, comment l'interpréter au niveau du subtil? Qu'est-ce que le contact immatériel?

Si l'on dit qu'une oeuvre ou qu'une idée nous touche, quel type de rapport faut-il comprendre?  Une idée immatérielle touche-t-elle le mental, immatériel lui aussi, qui la reçoit? La notion de toucher relatif à la matière est-elle encore pertinente et cela par rapport au sens classique où l'on comprend la matière, c'est-à-dire quelque chose de visible et de tangible, de dense?

La question est posée mais avant même d'avancer une hypothèse, il faut reconnaître qu'objectivement, nous ne pouvons objecter qu'il se passe parfois quelque chose dans nos êtres qui nous amène à cette conclusion que nous avons été touchés. Notre conscience enregistre un état de fait qui nous amène à cette réalité d'avoir été touché par quelque chose d'immatériel. Parfois indéfinissable, nous pouvons aussi mettre parfois des mots sur cette sensation et la quantifier. Si la sensation fait partie de la catégorie plus générale de perception, alors notre conscience perçoit et enregistre quelque chose d'ordre immatériel et cette sensibilité subtile nous informe d'un contact et nous pouvons affirmer que nous avons été touchés. Etre ému par une oeuvre, c'est avoir été touché, au sens où le rapprochement qui a eu lieu pendant un instant a produit un contact. Nous n'avons pas été indifférents au point de rester éloignés. Il y a bien eu abolition de l'espace -même symbolique- et connexion entre les deux éléments au point d'opérer une intimité. Ce moment magique où il y a rencontre et donc possibilité d'échange...

Glissons la proposition avancée par certaines traditions mais aussi la science contemporaine que finalement le plan physique est matière tout autant que le plan émotionnel et le plan mental. Ceux-ci seraient composés de matière beaucoup plus subtile, invisible à nos yeux physiques mais pour autant parfaitement existants et visibles avec "d'autres lunettes".
Ce qui expliquerait alors qu'une idée, en tant que matière idéelle subtile, puisse venir nous toucher mentalement dans notre corps mental, fait de la même matière subtile capable de les abriter. Et dès lors, quand il y a contact d'une idée, nous l'enregistrons dans notre conscience au point de dire que nous sommes touchés, mentalement parlant. Le phénomène est le même pour les émotions qui sont de la matière émotionnelle ressentie en tant que telle dans notre corps émotionnel chargé de traiter ce type d'information.
Idem encore pour le spirituel qui est d'un ordre encore plus subtil...

Mais revenons à notre sujet, il semble évident que le toucher est cette relation qui joint deux choses et que l'intimité de leur contact permet la transmission d'une ou plusieurs informations. La première étant d'ailleurs la connaissance du contact établi.  On peut alors légitimement dire qu'il y a communication, c'est-à-dire échange d'informations entre les deux parties réunies au point de se toucher. Et l'on conçoit dès lors que : toucher=> entrer en contact=> communiquer.
Il  semble même qu'il ne peut y avoir de transmission ni donc de communication en absence de ce point de contact où la relation est réalisée. Il apparaît même que communiquer c'est toucher et que les deux termes sont finalement parfaitement synonymes.


poign_e 


Peut-on imaginer toucher sans forcément communiquer? Même quand l'intention de communication consciente est absente, toucher c'est automatiquement transmettre quelque chose, même d'infinitésimal ou d'inconscient. Une poignée de main si banale transmettra des particules physiques, microbiennes, des énergies de la personne, des vibrations relatives à l'état de celle-ci qui seront transmises par le biais du contact avec l'autre main. Le point de rencontre est point d'échange et de communication. Toucher c'est transmettre.
Le toucher est donc ce sens qui, par extension symbolique, est responsable de la mise en relation de ce qui est séparé. Il abolit la distance et annule le loin pour faire du près, de l'intime, de la jonction, de la connexion et permettre l'échange entre ce qui était lointain et distinct.
Dans les textes orientaux relatifs à l’anatomie occulte de l’homme, on place d'ailleurs le sens du toucher dans la poitrine et le coeur, au centre de la constitution humaine... Serait-il le sens majeur sans lequel les autres ne pourraient jamais nous atteindre?  Sens cardinal, il invite à penser que le coeur -et donc l'amour- est le grand connecteur, permettant l'échange par la mise en rapport intime. Autrement dit, au centre du toucher se tient le coeur qui aime à mettre en relation les parties séparées pour les faire communiquer et partager...




Mise à part cette présentation philosophie du sujet, nous avons aussi abordé la question du "toucher et de la communication" avec Bénédicte Jarlot, kinésithérapeute, qui sortait pour l'occasion un petit guide de l'automassage. L'occasion d'avoir le point de vue d'une pratiquante professionnelle sur la question.


B


Nous avons relevé que le toucher est le 1er sens à se développer et le dernier à se retirer. Le toucher d'un bébé est essentiel pour sa santé et son éveil, il est le stade premier de la connaissance par lequel on découvre le monde. On peut même avancer qu'un enfant non touché meurt de manque de sensations, de chaleur humaine et qu'il se nourrit de ces premières sensations. C'est le premier rapport au monde qu'on ne peut éluder.
Il est aussi essentiel en gériatrie et souvent le dernier moyen de communiquer quelque chose, souvent d'un ordre archaïque et primaire (non au sens négatif du terme bien sur). Le toucher est accompagné d'un sentiment, d'une information

Nous avons entendu que la "peau parle", qu'elle est un vecteur d'information et que le masseur ressent quelque chose de subtil quand il masse un patient. Qu'à cet égard, se toucher, se masser, c'est prendre contact avec soi, entrer en relation avec soi et prendre conscience de soi, de son être, de son corps. Par le toucher, on se réapproprie ce corps que l'on habite et l'on peut se transmettre des sensations, du bien-être par le simple fait de se masser. Il y a une éducation du toucher à réveiller.

Le toucher est éminemment culturel en ce sens que la société codifie le toucher des individus entre eux, par des règles, des interdits. Peut-être parce qu'il touche justement au corps que l'on habite et que le toucher nous concerne donc directement, physiquement parlant. Nous avons évoqué différents type de sociétés : puritaine où le contact est réduit et l'évitement conseillé, le type méditerranéen plus tactile avec réduction des distances physiques...
Chez les Kanaks, on touche beaucoup et sans réserve l'enfant et ce jusqu'à la puberté. Ensuite, le statut change et des nouvelles règles s'appliquent puisque le corps a changé.

L'agression contre le corps par le toucher non désiré ni accepté est une violence.
Et si le toucher est vecteur de bien il peut aussi transmettre du mal. Il peut accompagner un sentiment bienfaisant ou malfaisant, donner une bonne vibration ou faire passer un mauvais "fluide"...
Dans nos sociétés "hygiénistes", le toucher doit être purifié. La découverte des microbes et l'obligation de propreté pour s'en prémunir à encadrer le toucher. Celui-ci étant parfois même vu  comme un danger.


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